IL d'Oléron
Mais, ce n’était pas prévu ça ! … Je partais pour passer mes vacances en famille, moi. Tout simplement. Dans mon cocon confortable des gens connus depuis toujours.
En sécurité.
J’espérais souffler un peu. Loin du boulot et, surtout, loin des autres. Ceux qui ne comprennent rien. Ceux qui se servent de moi. Qui se servent de moi comme je me sers d’eux, il faut bien que je me protège. Ceux qui me voit comme du consommable pendant que, moi, j’essaye d’en retirer bien assez de tendresse pour tenir.
Là, je partais dans un cocon déjà empli de tendresse. Je partais sans attente, sans espoir de plus. Autochtone, ici, je suis en terrain conquis, c’est mon territoire. J’y connais chaque coin, chaque recoin et chaque visage.
Et soudain, toi, tu débarques. Sorti du nulle part… Enfin, sorti de l’autre bout du continent. Et ça, ce n’était pas prévu. Vraiment. Ce n’était pas prévu mon cœur qui s’emballe, ce n’était pas prévu mes joues qui rosissent, ce n’était pas prévu mes mains qui tremblent, ce n’était pas prévu mes jambes qui faiblissent. Non, je ne t’avais tout bonnement pas prévu.
Il a fallu contenir ma surprise. Etouffer mes émotions de toutes mes forces. Me faire violence pour ne pas t’apeurer, ne pas te faire fuir. Cacher mon implosion.
Aïe ! Comme tu m’as plu ! Aïe ! Comme tu me plais…
Mais, pour être honnête, j’ai vite remis mon armure de protection. J’ai pensé que de toute façon, tu devais être comme les autres. Et puis qu’un homme comme toi avait certainement déjà quelqu’un dans le cœur. En vacances, entre potes, tu n’allais chercher qu’à t’amuser.
Et moi, je ne veux plus n’être qu’un jouet.
Mais tu m’as plu… Tellement… Trop… J’ai eu beau essayer de ravaler, ignorer, nier, me mentir, tu étais tout le temps là, à côté ou dans ma tête. A peine je croisais ton regard que mon cœur ratait un battement. Et tu étais si gentil, et tu étais si drôle… et tu étais si beau… et tu étais si Toi.
Et moi, je me sentais fondre malgré moi.
Alors voilà, je me suis dis qu’au fond, pourquoi pas ? Te laisser une chance. Surtout me laisser la mienne… Et nous en tester une.
Et quoi ? Au pire, je repartirai avec une nouvelle cicatrice.
Je suis habituée.
Je me suis dis que je pourrai me contenter de n’être que ton jouet, que c’était mieux que rien. Que contenir mes envies me paraissait plus violent que de prendre ce risque. J’en crevais. Alors, entre remords et regrets, j’ai tranché. J’ai plongé.
Toute entière, toute nue.
T’amener sur le sable encore gorgé de chaleur, le son des vagues dans les oreilles, le vent iodé dans nos cheveux et les yeux perdus dans les couleurs de la boule de feu qui se couche au loin. La terre, l’air, le feu et l’eau : Réunir tous les éléments et comploter avec eux pour enfin te goûter.
La boule de feu est ressortie de l’horizon quelques heures plus tard et nous étions toujours enlacés. J’ai souri devant ce joli nouveau matin.
Et surtout, tu souriais aussi.